Protégeons l’accès aux soins et à une vie digne pour les enfants et adultes trans*
Nous, association Viol-Secours, dénonçons la tenue de la conférence intitulée « Changement de sexe : l’autorité parentale remise en question », organisée par le collectif parents suisses le 3 juin prochain à Genève. Nous craignons que cet événement, sous couvert de questionnement parental et de préoccupation pour la jeunesse, véhicule un discours de haine transphobe, basé sur la peur, la désinformation et la pathologisation des personnes trans. En tant qu’association féministe engagée contre les oppressions patriarcales – notamment celles visant les personnes trans – il nous semble urgent d’agir.
Cette focalisation obsessive détourne pernicieusement l’attention des véritables enjeux : la santé mentale, la sécurité et la dignité des personnes concernées.
Leur objectif est-il vraiment de protéger les enfants ou plutôt de défendre leur vision essentialisante d’un monde où seule leur morale dicte qui nous devons être ?
Les faits sont clairs. Une étude publiée dans Nature Human Behaviour, menée auprès de plus de 61 000 jeunes personnes trans et non-binaires de 13 à 24 ans, révèle que les lois anti-trans aux États-Unis (restreignant l’accès aux soins d’affirmation de genre, aux toilettes du genre d’affirmation, etc.) augmentent de manière significative les tentatives de suicide chez les jeunes trans. Chez les adolescent-e-x-s de 13 à 17 ans vivant dans ces États, on observe jusqu’à 72 % de tentatives de suicide en plus par rapport à leurs pairs dans les États sans telles restrictions.
À l’inverse, de nombreuses recherches montrent que le soutien familial, l’accès aux soins adaptés et la reconnaissance légale et sociale de l’identité de genre réduit considérablement le mal-être et des risques suicidaires chez les jeunes personnes trans.
Nous sommes également profondément préoccupé-e-x-s par le choix des intervenant-e-s à cette conférence, dont certain-e-s apparaissent sur des plateformes Internet femonationalistes, fascistes et réactionnaires (invitation du collectif Némésis, soutien à colonisation de la Palestine par l’état d’Israël, discours « anti-woke », etc.) connues pour leurs propos ouvertement transphobes. Deux des personnes associées ont notamment coécrit le livre intitulé « Transmania : enquête sur les dérives de l’idéologie transgenre », dont le titre seul traduit déjà l’hostilité idéologique. Nous soutenons par ailleurs les personnes en processus de détransition, leurs vécus et leurs difficultés. En lien avec cette thématique, nous conseillons de consulter le rapport de l’association Agnodice.
Il est essentiel de rappeler que les transitions de genre prennent des formes variées : sociales, administratives, médicales. Les opérations chirurgicales de réassignation de genre (chirurgies génitales) concernent en réalité très peu de personnes et ne sont pas pratiquées sur des personnes mineures en Suisse. Affirmer le contraire relève de la désinformation et de la manipulation émotionnelle. Protéger les enfants trans, ce n’est pas leur interdire d’exister ou de s’exprimer. C’est les écouter, les croire, et leur garantir un cadre sécurisé, bienveillant et respectueux. Ce n’est pas l’affirmation de leur genre qui les met en danger, mais bien la stigmatisation, l’isolement et la violence institutionnalisée.
Nous appelons :
- À la vigilance face à la prolifération d’événements se présentant comme « neutres » ou « informatifs » mais qui dissimulent une idéologie transphobe,
- À la responsabilité des institutions, des médias et des collectivités publiques quant à l’accueil et la diffusion de tels événements,
- Au soutien clair, actif et continu envers les jeunes trans, leurs familles et les professionnel-le-x-s qui les accompagnent,
- À un féminisme trans-inclusif
La transphobie tue. Ne fermons pas les yeux.
Ressources
https://agnodice.ch/wp-content/uploads/2023/03/Agnodice_etats_connaissances_detrans-2.pdf