Prise de parole à l’occasion de la Grève féministe du 14 juin 2024
Les yeux grand ouverts
C’est du ventre, de la poitrine, de la gorge, du corps tout entier que ça part.
Longtemps policée, cadenassée et l’apanage d’une masculinité toxique, la colère est désormais nôtre, elle est là, et bien là.
Source puissante d’énergie et de détermination, lucide et ciblée, la colère nous tient et nous rassemble aujourd’hui, 14 juin.
Ensemble, nous sommes la colère qui jaillit des corps. Nous la portons en nous et désormais elle ne se taira plus.
La colère nous ouvre les yeux et nous rend lucide.
C’est, en effet, les yeux grand ouverts que nous divulguons un des secrets les mieux dissimulé et tronqué du patriarcat: l’omniprésence des violences sexistes et sexuelles, des violences racistes, validistes, islamophobes, transphobes, lesbophobes et queerphobes, la permanence de toutes les discriminations qui maintiennent en place un ordre social basé sur des rapports d’exploitation, de domination et d’aliénation.
C’est, les yeux grand ouverts, que nous dévoilons ce que nous connaissons touxtes, à même nos corps, à même nos vies : les violences d’Etat, les violences policières, les violences dans la rue, au travail, à l’école, dans nos lieux de soin, à la maison.
C’est enfin, les yeux grand ouverts que dénonçons l’impunité des agresseurs, la silenciation des victimes et l’inaction de l’État.
Corps humiliés, bafoués, violentés, corps assignés, contrôlés, corps tués.
Mais pourquoi tant de haine ?
C’est au cœur même du patriarcat que se fomente cette haine.
De même que le commerce des esclaves, l’extermination des populations autochtones et la chasse aux sorcières annonçaient l’avènement du capitalisme moderne, de même la haine de l’autre, du féminin en chacun-e-x de nous, de l’étranger-ère-x est au cœur du patriarcat.
Ne nous voilons pas la face et, les yeux grand ouverts, constatons qu’il y a actuellement un backlash, une poussée des mouvements conservateurs. Une idéologie binaire réactionnaire, haineuse, une offensive misogyne, masculiniste, raciste, islamophobe, queerphobe, est à l’œuvre et s’étale en toute impunité, décomplexée.
Désormais en colère, plus jamais nous ne fermerons les yeux.
En colère, ON NE LACHE RIEN.
Féministes anticapitalistes, antiracistes, antifascistes refusant tous types de discrimination, nous réaffirmons que chaque vie est une vie à part entière et que chaque vie compte.
A celleux qui osent parler, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A celleux qui n’osent pas parler, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A celleux qu’on empêche de parler, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A celleux qui parlent tout de suite ou des années après, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A celleux qui n’ont pas eu le temps de parler, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A celleux qui sont bafoué-e-x-s par une police et une justice complice des agresseurs, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A celleux qui sont rejeté-e-x-s par leur familles, leurs amis et leurs proches, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A touxtes les enfants qui ne sont pas entendu-e-x-s je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
A chacunex, je dis « je te crois » (ensemble) « on te croit, on te croit,… »
Le collectif est une stratégie de survie. C’est un moyen puissant pour renouer avec notre pouvoir en nous articulant les un-e-x-s aux autres.
Vivant-e-x-s, uni-e-x-s, notre puissance féministe, notre colère ne cessera pas, notre colère gronde et résonne, chaque jour plus fort, chaque jour plus radicale.
Aujourd’hui, 14 juin, nous sommes là !
Aujourd’hui, 14 juin les yeux grand ouverts,
Féministe-x-s, forte-x-s, fier-ère-x-s et en colère,
ON NE LACHE RIEN !